L’exposition "YUXI NUKUKUNAI, O Encontro de Almas (les Rencontres d’Âmes)” ouvre un nouveau dialogue avec les oeuvres et l’engagement de Frans Krajcberg, porté par l’espoir d’une (re)connexion avec le Vivant.
Nous ne pouvons vivre sans la forêt, la terre, l’air, les planètes... pour les Huni Kuin, le terme “yuxi” désigne la part de magie et de spiritualité qui émane des paroles, des gestes ou des créations et qui relie les êtres à la Nature.
Avec l’exposition "YUXI NUKUKUNAI, O Encontro de Almas (les Rencontres d’Âmes)”, la commissaire d’exposition et artiste Kássia Borges Mytara met en lumière l’évolution du mouvement MAHKU (Movimento Artistico Huni Kuin), depuis ses premiers dessins en 2012-2013, élaborés dans une optique pédagogique, jusqu’à la reconnaissance institutionnelle et internationale de l’art des MAHKU moins de dix ans plus tard : expositions avec la Fondation Cartier en France, au Musée d’Art de São Paulo (MASP), à la 35e Biennale de São Paulo, ou, plus récemment à la 60e Biennale de Venise...
Comment le recours à la peinture a permis à ces artistes de sauvegarder leur culture, jusqu’ici orale, en assurant sa transmission, mais aussi en devenant les portes parole, à l’internationale, du message spirituel de leur peuple, profondément lié à la Nature et à la Guérison.
Kássia Borges Mytara apporte un regard féminin, féministe, au sein du collectif, qu’elle fait dialoguer ici avec son propre travail de céramiste. Épouse du chaman Ibã, fondateur du collectif MAHKU, “mère” de ses autres membres et artiste reconnue depuis les années 1980 - elle a un rôle fondamental au sein du groupe. Tournée vers la “cura”, la guérison, ses recherches personnelles et celles du collectif se rejoignent dans l’exposition.
Le travail des MAHKU, et dans une certaine mesure de Kássia Borges Mytara, étant fondé sur la transfiguration en peinture des chants traditionnels Huni Kuin, nés des visions provoquées lors des cérémonies spirituelles du nixi pae, (ayahuasca), le son est centrale dans leur démarche. C’est pourquoi l’exposition est accompagnée d’un “chant de guérison” et d’un design sonore transportant le public au cœur de la forêt.
Réalisées collectivement, les œuvres présentent des figures bidimensionelles, aux couleurs vies et intenses, inspirées de la nature et des visions psychédélique provoqées par l'ayahuasca. Elles sont souvent bordées par un graphisme stylisé de serpent; le Jiobia (boa), en référence à l'esprit de la Femme-Serpent, figure centrale dee la mythologie Huni Kuin.
"Nous assistons à un mouvement vigoureux dans l’art contemporain, dont certaines évolutions portent un message résolument antiraciste. C’est la direction prise par les artistes autochtones brésiliens, qui se sont organisés pour développer et permettre l'émergence d'un espace cosmopolite de création artistique, unique et puissant, capable de marquer durablement le monde.
Frans Krajcberg a expérimenté l'art qui dénonce les atteintes à l'environnement, en démontrant
la nécessité de ce combat. Son travail est un Cri. L'exposition "YUXI NUKUKUNAI, O Encontro de Almas (les Rencontres d’Âmes )”, a été conçue autour de la rencontre entre l'esprit vivant de la forêt et la nécessité de la préserver. " (Kássia Borges Mytara).
Le Mouvement MAHKU
(Movimento Artistico Huni Kuin)
Le mouvement Mahku (village de Chico Curumim, Alto do Rio Jordão, Acre) est un mouvement d'artistes autochtones de l'ethnie Huni Kuin, également connue sous le nom de Kaxinawá, formé en 2012 par le guérisseur, leader et chaman Ibã Huni Kuin. Les autres membres du mouvement sont Kássia Borges Mytara, Acelino Tuin, Cleiber Bane, Pedro Maná, Yaka Huni Kuin, Rita Sales, Cleudo Teana Tuin et Isaka Huni Kuin.
En 2012, Ibã Huni Kuin, a initié une recherche pour enregistrer les chants traditionnels de son père et de ses oncles et ainsi sauvegarder la culture de son peuple, jusqu’ici orale, qui était menacée de disparition. Le travail du mouvement exprime également les tendances politiques et sociaux des Huni Kuin, dans leurs luttes continues pour promouvoir la justice environnementale. Grâce à l’art des MAHKU, la communauté d’Ibã a pu retrouver un mode de vie traditionnelle, racheter des terres, les protéger de la déforestation et y construire de nouvelles maisons.
Kássia BORGES MYTARA
Kássia Borges Mytara est artiste plasticienne, chercheuse, enseignante, commissaire d’exposition et militante Karajá. Ses recherches artistiques portent sur l’autochtonie et sa résistance, les femmes, la généalogie et la guérison. Utilisant principalement le médium argile dans sa pratique, elle fait aussi partie du mouvement MAHKU - Movimento Dos Artistas Huni Kuin [Mouvement des artistes Huni Kuin], qui traduit en peinture les chants traditionnels du peuple Huni Kuin, nés des visions provoquées lors des cérémonies spirituelles du nixi pae (ou ayahuasca). Au sein du collectif et dans sa propre pratique, l’artiste travaille sur sa relation intime à la nature et replace la femme au cœur des mythes autochtones.
Kássia Borges Mytara s'est donné pour mission de « guérir par l'art ». Dans ses oeuvre récentes, elle rend hommage aux femmes autochtones contemporaines, qui tentent de contribuer à un changement positif dans le monde en devenant, finalement à leur tour, guérisseuses, chamanes, cheffes spirituelles et militantes.
L'artiste est impliquée dans les activités du musée des Peuples autochtones d’Uberlândia depuis 1987. En 2022, elle est nommée commissaire d’exposition associée au musée d’Art de São Paulo (MASP). Ses œuvres font partie
des collections publiques brésiliennes, au musée d’Art contemporain de Goiânia, à la Pinacoteca de São Paulo et au MASP.
En 2023, elle s'installe au Chemin Montparnasse pour participer à une résidence de recherche organisée par AWARE (Archive of Woman Artist, Research and Exhibition), dans le cadre du programme The Origin of Others, en partenariat avec le Clarck Institute.
Programmation
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12 septembre, à 19h : chant chamanique d’ouverture par Ibã Salles Huni Kuin
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18 septembre à 18h30 : rencontre avec la Fondation Cartier pour l’art contemporain : retour sur l’histoire du collectif Mahku
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2 octobre à 18h30 : rencontre avec la journaliste Eliane Brum, fondatrice du collectif de journalistes “Sumauma” plateforme sur l'écologie en Amazonie, dans le cadre du lancement français de son ouvrage Banzeiro Òkòtó: uma viagem à Amazônia Centro do Mundo (Banzeiro Òkòtó: un voyage en Amazonie, Centre du Monde) - éditions Sous sol.
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24 octobre à 18h30 : conférence sur les femmes autochtones, artistes et militantes, avec AWARE (Archives of Women Artists, Research and Exhibition), Rita Huni Kuin, Kássia Borges Mytara, Céleste Fabiola Mayorga Urbina.
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12 décembre à 19h: Projection du film de Bianca Dacosta Interior da terra [L'intérieur de la terre], 17', 2022. Voyage du ciel au coeur des entrailles de la forêt Amazonienne, interrogeant le contexte politico-social de la région et donnant la parole au peuple Mura.